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Le débat autour de la fameuse robe bleue et noire ou blanche et dorée de 2015 a laissé de nombreuses questions en suspens.
Quelle est la couleur du cheval blanc d’Henri IV? Si la réponse à cette question fait l’unanimité, voir la robe de l’animal de ses propres yeux diviserait en revanche l’assemblée. Il s’avère en effet que les teintes varient considérablement d’un individu à un autre, et ce pour de nombreuses raisons. De l’anatomie de nos yeux, à la façon dont notre cerveau traite les informations, en passant par la langue que nous parlons, notre date de naissance ou même notre environnement géographique, notre perception du monde peut changer.
Comme le rapporte Scientific American, chaque groupe culturel a ses propres distinctions entre les couleurs et apprend différemment à les classifier. Dans certaines langues comme le vieux gallois, aucune différenciation n’est faite entre le bleu et le vert, tous deux appartiennent à une catégorie de grue. En revanche, en russe siniy désigne le bleu foncé tandis que goluboy est réservé à un bleu plus clair. Jenny Bosten, neuroscientifique à l’université du Sussex en Angleterre, se questionne: «Voit-on réellement les couleurs autrement ou s’agit-il simplement d’une question linguistique?»
Nous semblons bel et bien avoir une perception distincte des teintes, même entre semblables. Que la personne qui ne s’est pas pris la tête avec son entourage en 2015 autour du sujet explosif de la fameuse robe bleue et noire (ou blanche et or!) jette la première pierre. «Les individus qui la voient bleue et noire la perçoivent en réalité comme éclairée par une lumière jaunâtre, alors que la team blanche et or perçoit une lumière bleutée. C’est le cerveau qui porte un jugement sur le type d’éclairage de la robe», révèle la neuroscientifique.
Cette perception dépend entre autres des couleurs que nous sommes habitués à rencontrer. «À York, ville plutôt grise et sombre en hiver, et verte en été, une étude a été menée et on a constaté que la longueur d’onde que les habitants perçoivent comme du jaune pur change avec la saison. La date de naissance a également un impact sur notre vision selon la couleur de la lumière à laquelle nous avons été exposés au cours de notre développement visuel», expose Jenny Bosten.
L’anatomie de l’œil
Cette différence peut également être liée à l’aspect physiologique. Avec l’âge, surtout après 40 ans, le cristallin jaunit et la quantité de lumière bleue qui atteint la rétine est réduite. En outre, une corrélation aurait aussi été établie avec la couleur de l’iris: les personnes aux yeux bleus semblent mieux réussir les tests de discernement des nuances. Enfin, «l’alimentation peut jouer un rôle. Plus vous consommez de lutéine et de zéaxanthine, présentes dans les légumes-feuilles, plus le pigment maculaire –qui absorbe les courtes longueurs d’onde bleues– sera épais», explique Jenny Bosten.
La plupart des personnes possèdent trois types de cônes –des photorécepteurs de lumière– dans la rétine. Néanmoins, une variation génétique peut altérer la vision des couleurs si l’un des cônes est différent, comme dans le cadre du daltonisme rouge-vert. Il s’agit ici d’une anomalie dans les photorécepteurs L (sensibles à la lumière rouge) et M (sensibles à la lumière verte).
En cas de dichromatisme, seuls deux des trois cônes seront présents ou fonctionnels, et la personne affectée aura alors une vision des couleurs unidimensionnelle, lui enlevant un axe entier de la perception des teintes. Au contraire, plus de 50% des femmes ont quatre types de photorécepteurs, mais «très peu en ont conscience. Deux des cônes sont très légèrement différents ce qui ne suffit pas pour qu’elles aient une vision tétrachromatique», précise la scientifique.
Alors, que perçoit réellement notre voisin? Avons-nous la même définition que lui du bleu ou du rouge? Nous ne le saurons probablement jamais.
Lien source : Tout le monde ne perçoit pas les couleurs de la même manière